Rendez-vous avec la Peur

Rendez-vous-avec-la-peur-20111206050105— Avec ce classique de Jacques Tourneur, rendez-vous avec Mili et Fred pour une soirée frayeur. Lesquels dans la pénombre se sont emmitouflés dans la couverture du chat, au plus profond du creux du canapé. Brrrrrrrr…

night of the demon

Fred :

Histoire Lovecraftienne à base d’occultisme, d’hypnose qui tourne mal et d’inscriptions runiques sur des parchemins, dès la scène d’intro, ça commence fort. Le bon vieux professeur Harrington, qui enquête sur les activités occultes de l’étrange docteur Julian Karswell, se fait attaquer par un gros démon. Le gros démon a une bonne tête de muppet, fume de partout et fait bien trois étages. La mort du professeur reste accidentelle (un accident de voiture) mais voilà, le spectateur est dans la confidence : un gros démon se balade dans la campagne anglaise…

On suit alors le collègue et la nièce de ce professeur qui reprenne l’enquête là où elle s’est achevée, Dana Andrews incarne un cartésien invétéré, droit dans ses chaussures, qui en bon scientifique analyse tout ce qui bouge avant d’en tirer des conclusions forcément rationnelles.  Tandis que la nièce du défunt croit avant tout ce qu’elle voit, et ce qu’elle voit est forcément, à peu de chose près, l’oeuvre du Démon. L’histoire joue sur ces différences de point de vue. Une même scène donnera lieu à deux visions totalement opposés.

Le professeur mettra à l’épreuve son scepticisme, surtout lorsque lui sera prédit une mort certaine dans trois jours…

Jacques Tourneur nous tient en haleine avec une histoire de démon, simple en apparence, se transformant tout doucement en course contre le temps, à mesure que les convictions du professeur se réduiront en un petit tas de cendre. Le démon, lui, on ne le voit qu’à deux moments du film : au tout début bien sûr et… je vous laisse deviner quand il apparaîtra à nouveau.

 Jacques Tourneur fait montre d’un vrai sens de la mise en scène. Fluide, carrée, rythmée, d’une élégance à faire pâlir les réal d’aujourd’hui, jamais prise en défaut et se faisant oublier pour mieux nous surprendre lors des scènes de peur. Avec des acteurs tous impeccables, lesquels sont bien aidés par des dialogues millimétrés. Le noir et blanc est splendide, du genre qui impressionne à la chaîne pellicule, nos yeux et notre cortex :

chat se métamorphosant dans la pénombre d’un salon cossu, scène de poursuite expressionniste dans les bois…

Le cinéaste joue avec le spectateur, calcule ses effets, en ayant toujours deux ou trois longueurs d’avance sur nous, comme dans cette scène de spiritisme. Au départ le médium apparaît comme un charlatan grotesque. Débute la séance, ses comparses (deux mémés fans d’occulte, dont la propre mère de Karswell) se mettent à chanter… J’étais à deux doigts de rire devant l’air interloqué du professeur, Mais non, le médium se met à parler avec une voix de petite fille, et enchaîne en prenant, c’est la nièce qui l’assure, celle du défunt professeur Harrington…

Tourneur joue et continue de jouer. Son sinistre Docteur Karswell fait le clown avec les enfants du village, se révèle être un parfait gentleman un peu rond ou un fils à maman (la Marthe Villalonga satanique a l’air toute mimi)… Mais ce docteur insaisissable reste tout le long une menace imprévisible.

Avec Rendez-vous avec la Peur se révèle à moi le génie intemporel de Tourneur (le film a plus de 50 ans, bordel !).

g5

nightdemon-hallway

Mili :

Je n’aime pas les films d’horreur … c’est très différent de dire que je n’aime pas les films qui font peur … ce n’est pas très logique je sais, je suis une fan Hitchcock mais je ne peux pas regarder deux minutes de the Ring ou autre la colline a des yeux…. c’est comme ça. Du coup un film dont le titre annonce Rendez-vous avec la peur, ce n’est pas forcément gagné à la base, et puis la VOD a chargé l’affiche… et là j’ai eu envie de le voir, un vieux film en noir et blanc terrifiant comme j’aime.

Tout n’est que maîtrise, les noirs et blancs sont traités avec une finesse impressionnante dont l’apogée est atteinte lors d’une scène importante du film, une course dans la forêt où ombre et lumière apporte à la peur qui monte une beauté fantasmagorique, on se perd dans ce jeu d’ombre et lumière qui met en valeur la beauté des décors (et de l’actrice). J’aime le rythme des vieux films, la lenteur avec laquelle le réalisateur distille en nous le frisson, il me fait sursauter avec un enfant masqué puis frissonner dans une maison vide et sursauter encore avec une simple main inconnue. Un pur plaisir où rien n’est jamais trop montré, trop décrit, tout n’est pas montré et c’est cela qui crée la peur.

L’apparition du démon est très controversée, il est rare pour l’époque que les peurs soit ainsi incarnées et il est vrai que l’apparition n’est pas obligatoire, elle aurait sûrement pu être évitée. Mais le studio l’a imposé et on pourra dire tout ce que l’on veut, cela n’y changera rien. Il est vrai qu’il a bien vieilli ce démon mais son apparitions travaillée rattrape bien le coup et on passe dessus sans problème, quand même effrayé par ce démon inconnu.

L’histoire elle est bien ficelée, on passe de l’ésotérisme a la magie noire en un instant (voire même au vaudou par moment) passant d’un magicien qui fait sortir des chien d’un chapeau a une séance qui tourne au comique puis a des runes effrayants où la seule vision d’un bout de papier se rapprochant d’un feu, poussé doucement pas le vent devient une vision d’horreur, créant une tension rarement égalée dans le cinéma d’aujourd’hui. Le tout est vu par les yeux cartésiens d’un scientifique sceptique qui peine à croire à ce qu’il voit et apporte une critique intéressante des superstitions de l’époque.

Au final c’est une très belle découverte et j’ai bien envie de découvrir les autres films du réalisateur.

g5

Une réflexion sur “Rendez-vous avec la Peur

  1. j’adore ce film ! lovecraft aussi, j’avais fait un dossier sur lui à la fac. dans le même genre et de la même époque, j’adore la maison du diable , la main du diable, la féline etc…

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